Pour le meilleur et les coups- de Nathalie Flore: déconstruction du machisme

Publié aux éditions APPEL (Cameroun) en 2023, « Pour le meilleur et les coups » est le nouveau roman de Nathalie Flore, romancière et chroniqueuse camerounaise.

    Divisé en 28 chapitres, le roman peint la vie d’un couple au Cameroun : Ebanada, fonctionnaire au port, est le mari de Tonga, femme au foyer avec qui il a deux filles.

    Ebanda est un homme violent, égoïste, jaloux maladif, paranoïaque…Il tabasse souvent sa femme et lui interdit les sorties, les visites à l’église, d’être belle. Cependant, il aime éperdument sa maitresse Marie Léonie et la respecte beaucoup. « Son corps jaune présente quelques taches noires, des cicatrices des blessures et des marques de fouet » (chapitre 2)

Tonga assume sa soumission, cache ses cicatrices  et fait semblant d’être heureuse. Son mari double de violence et de maltraitance, sachant qu’elle ne pourra jamais le quitter.

    Un jour, la maitresse  Marie fait la rencontre de Tonga et devient, avec ruse, sa meilleure amie. Elle pense mener ce jeu pour sauver cette dernière de l‘enfer qu’elle subit.

    A quoi aboutira ce jeu dangereux de Marie Léonie ? Tonga assumera à jamais son rôle de femme soumise et battue ou bien arrivera son jour de révolte?

   A travers la vie d’un couple, le roman explore l’enfer subi en silence  par les femmes mariées au Cameroun et dans les régions qui lui ressemblent : infidélité, coups, torture morale, et toutes sortes de maux.  Le roman fustige ce traitement inhumain et incite les femmes victimes à se révolter et à sortir du silence. Plus qu’un hommage à ces femmes, le roman est un cri à caractère féministe. La dédicace l’illustre bien : « à toutes ces femmes qui en silence subissent… ».

    Le roman explore les zones sombres du mariage, gardées sous silences par les couples notamment les épouses. Implicitement, le mariage est comparé à une sorte d’hypocrisie sociale qui sert de faux-semblant. Par exemple, devant les autres, Ebanda jure ne jamais toucher sa femme ; celle-ci dit mener une vie tranquille avec son conjoint.

   L’auteure fustige en coutre la tradition, un facteur qui détruit la notion de mariage ; au nom de la tradition, la femme doit assumer sa soumission, recevoir en silence les coups, faire de son mari un dieu. C’est la tradition.  Du coté masculin, l’homme doit tabasser sa femme pour qu’elle soit droite et l’aime davantage. Par exemple, Ebanda suit à la lettre  les conseils de son père sur la question de machisme et de sadisme. « Le rôle de la femme c’est à la maison à s’occuper des enfants » (chapitre 01). Ainsi, le roman déconstruit le patriarcat et le machisme  héréditaires.

Le roman est le fruit de l’imagination et de l’observation. Après observation de son entourage, l’auteure a décidé d’en faire un roman, surtout qu’elle est chroniqueuse. Ainsi, le roman ressemble à une longue chronique : miroiter la société à travers la littérature. Beaucoup d’identifient, que ce soit à Ebanda ou à Tonga.

Le roman montre l’intérêt que porte l’auteure au thème de la condition féminine. Elle est également l’auteure de « Le combat d’une mère célibataire ». Ainsi, avec ses mots, elle dit les silences des femmes, transcrit leurs combats dans une société patriarcale et misogyne.

Pour une lecture croisée, il est utile de lire le dernier roman de la romancière tunisienne Khaoula Housni « Le Prix du Cinquième jour » (Arabesques éditions 2023) : les deux livres ont beaucoup de points communs dont l’amitié d’une épouse trahie avec la maitresse de son mari.

L’écriture est sobre et suscite l’empathie chez le lecteur. L’auteure  réussit à traduire les sentiments et sensations des personnages pour peindre le combat des femmes battues.

Simple et profond, mêlant les sentiments et sensations, croisant l’observation à l’imagination, « Pour le meilleur et les coups » est un roman qui dit le silence des femmes battues. Un combat contre la tyrannie machiste. Un beau cri féministe !

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Point fort : caractère féministe

L’auteure: Nathalie Flore est une jeune romancière et chroniqueuse camerounaise. «Pour le meilleur et les coups » est son dernier roman.

Par TAWFIQ BELFADEL

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