Ajar-Paris _ de Fanta Dramé : à la recherche du père et de soi entre France et Mauritanie

Il s’agit du premier roman de Fanta Dramé, jeune écrivaine française née de père mauritanien et d’une mère sénégalaise.  Le livre est préfacé par Faiza Guène  qui en dit ; « On lit parfois certains romans  comme on parcourt une carte aux trésors. Ajar-Paris est de ceux-là ».

Après la mort de sa grand-mère, Fanta rentre pour la première fois au village natal de son père, Ajar en Mauritanie. De retour dans la capitale, elle décide d’écrire l’histoire de son père. « Je vais écrire ta vie, papa » (p59)

Ainsi, aux souvenirs du père se mêlent ceux de l’auteure et divers fragments de l’histoire familiale. Né à Ajar, envoyé dès l’enfance faire l’école coranique au Mali, le père émigre vers la France dans les années 1970. Après les multiples difficultés, il mène une vie tranquille avec son épouse sénégalaise et ses enfants.

Vers où aboutira cette quête identitaire ? Comment Fanta décrit-elle ce pont entre les deux rives , la France et la Mauritanie ?

Le roman est autobiographique. Les signes en sont apparents et directs. L’auteure Fanta a fait de l’histoire de son père et celle de sa famille une œuvre littéraire. Les scènes  et les actions sont rares ;  le tout est centré sur des souvenirs et fragments biographiques de la famille. « Je vais écrire ta vie, papa » (p59)

Si l’auteur raconte le récit de son père, cela n’empêche que le roman peigne aussi la vie des émigrants qui ont tout laissé derrière eux pour s’installer en France. Ainsi, le roman est un hommage à l’humanité des émigrants qui vivent  entre deux rives, l’exil et la terre natale.

Le roman est un trait d’union, un pont, entre les deux rives France et Mauritanie. Là, il ne s’agit ni d’exil ou de nostalgie ou de choc culturel, mais d’une conciliation tranquille, un entre-deux équilibré entre les deux cultures. Par exemple, le père tantôt s’habille en boubou africain, tantôt en costume européen; aux mots français se mêle le dialecte mauritanien. Ainsi, le roman est aussi un hommage aux gens à l’identité plurielle, qui portent les deux terres dans le cœur, qui voient la double culture comme une richesse identitaire pas un déchirement.«  Nous, les enfants n’avions jamais vu Ajar, mais on avait fini par s’en faire une idée, forgée par la manière dont mon père la racontait » (p 33)  

Le roman a également un caractère ethnographique. Çà et là, l’auteure offre des éléments de la culture mauritanienne : traditions, plats, mots en dialecte, superstitions, légendes…

Pour des lectures croisées, il est utile de lire les romans d’Azouz Begag et de  Faiza Guène qui mettent le père et l’identité au centre de leurs romans  au caractère autobiographique.

Sobre et humain, tissé par  l’autobiographie, Ajar-Paris est une quête des origines à travers le récit du père. C’est aussi un hommage aux émigrants et un pont d’amitié entre les deux rives.

Lire aussi : entretien avec l’écrivain mauritanien Mbarek Beyrouk

***

Point fort du livre: écrire la Mauritanie directement en français

Belle citation: « On a souvent  tendance à décrire les gens qui partent par le résultat de leur exil, plutôt que par le point de départ, des immigrés plutôt que des émigrants, avec tout ce que le premier terme véhicule de péjoratif » (p74-75)

L’auteure: née en 1987 à Paris, Fanta Dramé est diplômée en lettres, enseignante au lycée. Ajar-Paris est son premier roman.

Ajar-Paris, Fanta Dramé, éd. Plon, France, 2022, 208p

Par TAWFIQ BELFADEL

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