Entretien avec Samir Kacimi: ‘je ne choisis pas l’absurde, je m’y abandonne ‘

Lecture-Monde vous offre un excellent et riche entretien avec le romancier algérien Samir Kacimi qui, bien qu’il écrive en arabe, a répondu en français à nos questions.

Pour moi, l’absurdité n’est pas simplement un choix esthétique ou une technique narrative que j’emprunte pour orner mes textes. Ce n’est pas un vêtement que je fais porter à mes personnages pour ensuite le leur retirer à la fin du roman. L’absurdité est la vérité nue, elle est le tissu originel de l’existence que nous menons, et en tant qu’écrivain, je n’ai pas le luxe de l’ignorer ou de l’embellir. Ma mission est de creuser dans cette réalité jusqu’à atteindre son ossature, et ce que j’y trouve n’est autre que ce sentiment profond de non-sens qui nous hante tous. Quand j’écris, je ne « choisis » pas l’absurde. Je m’y abandonne. Il s’impose à moi comme une force de la nature, comme une gravité qui attire toute chose vers son centre vide.

Mes personnages ne sont pas des êtres excentriques que je manipule pour le plaisir. Ce sont des âmes tourmentées, ils sont « moi », « vous », et « nous », piégés dans une comédie grotesque dont nous n’avons ni écrit le scénario ni choisi les rôles. Ils crient, se rebellent, aiment, détestent, et finalement, se heurtent au mur de l’illogisme qui les entoure.

Écrire sur l’absurde est ma tentative de donner une forme à ce cri étouffé dans nos poitrines. C’est ma façon d’affronter le vide, non pas en le fuyant, mais en le fixant droit dans les yeux jusqu’à ce qu’il recule, vaincu. L’ironie et l’humour noir dans mes romans ne sont pas là pour un divertissement superficiel ; ils sont la dernière arme qui reste à l’être humain face à un monde impitoyable. En fin de compte, je n’écris pas sur l’absurde parce que je le considère comme un choix artistique intéressant mais parce que je le respire, je le vois dans les détails de la vie quotidienne, dans les bulletins d’information, dans les yeux des gens dans la rue. Écrire à son sujet est une nécessité existentielle, une tentative de rester sain d’esprit dans un monde qui a perdu la raison. Ce n’est pas juste un roman, c’est un témoignage sur une époque, et peut-être… une dernière prière dans un temple abandonné.

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Brouiller les repères entre le réel et la fiction n’est pas un jeu de magicien ou une simple coquetterie stylistique. C’est une nécessité philosophique. Parce que la frontière que nous croyons si nette et si solide entre ces deux mondes est, en vérité, l’illusion la plus fragile qui soit. Nous vivons dans une ère où le « réel » lui-même est une construction, un récit façonné par les médias, par le pouvoir, par nos propres désirs et nos peurs. La fiction, de son côté, n’est jamais purement imaginaire ; elle est pétrie de nos réalités, de nos souvenirs, de nos angoisses les plus concrètes.

 Le roman n’est ni un miroir passif du réel, ni une fuite lâche dans l’imaginaire ; c’est un champ de bataille. C’est sur ses pages que le réel et la fiction s’affrontent, se déconstruisent et, parfois, fusionnent pour créer une vérité plus profonde. Mon travail, en tant que romancier, n’est pas de vous dire « ceci est vrai » et « ceci est faux » mais  de vous faire douter de cette distinction même. Je veux que le lecteur, en fermant le livre, regarde le monde qui l’entoure et se demande : « Et si ce que je considère comme la réalité n’était qu’une fiction bien racontée ? Et si la fiction de ce roman contenait plus de vérité que mon journal télévisé ? » La place du roman est donc celle d’un révélateur. En mélangeant délibérément les faits et l’invention, en insérant des éléments documentaires dans une trame fictive ou en traitant des événements historiques avec la liberté de l’imagination, je ne cherche pas à tromper le lecteur. Au contraire, je cherche à l’armer. Je lui offre des outils pour aiguiser son esprit critique, pour qu’il apprenne à déceler la fiction cachée dans le réel, et la vérité tapie dans la fiction.

Le roman devient alors cet espace subversif, ce troisième lieu où les certitudes s’effondrent. Il n’est pas un pont entre le réel et la fiction, mais plutôt un séisme qui fissure le sol sous leurs fondations, nous forçant à regarder dans les crevasses pour y apercevoir ce qui se cache vraiment en dessous. C’est là, dans cette zone d’inconfort et de questionnement, que la littérature trouve sa véritable puissance et sa raison d’être : non pas pour donner des réponses, mais pour nous apprendre à poser les bonnes questions sur la nature même de notre réalité.

Excellente question, qui touche au cœur de ma démarche. Mais réduire la satire à un simple choix entre « divertissement » et « sous-entendus » serait comme demander si un scalpel est fait pour couper ou pour guérir. Il est fait pour les deux, l’un étant la conséquence de l’autre. La satire, dans mes romans, n’est jamais une fin en soi, et certainement pas un simple artifice pour amuser la galerie. Le divertissement, le rire que peut provoquer la satire, ne sont que l’appât. Notre réalité est souvent si tragique, si absurde, que la regarder en face sans aucun filtre serait insoutenable. Le rire satirique est une anesthésie temporaire, elle permet au lecteur de baisser sa garde, d’ouvrir son esprit. Et c’est précisément à ce moment-là que le scalpel du sous-entendu peut faire son travail : inciser les couches de certitudes et d’hypocrisie pour atteindre le mal profond.

Mes personnages satiriques sont des miroirs déformants. Ils ne sont pas des caricatures gratuites ; ils sont l’amplification monstrueuse de nos propres défauts, de nos lâchetés,  de la vacuité de nos intellectuels, de la bigoterie de nos prétendus sages. En riant d’un personnage grotesque, le lecteur rit en réalité d’une facette de sa propre société, et peut-être, s’il est honnête, d’une facette de lui-même.

Le sous-entendu est donc l’objectif final. La satire est l’arme la plus efficace pour critiquer le pouvoir, la corruption et la bêtise humaine, surtout lorsque la critique directe est censurée ou simplement inaudible. Elle permet de tout dire sans avoir l’air de le dire. Elle crée un pacte de complicité avec le lecteur intelligent, qui sait lire entre les lignes et décoder le message. C’est une forme de résistance. Donc, pour répondre directement : ce n’est ni l’un, ni l’autre. C’est une stratégie où le divertissement est le véhicule et le sous-entendu est la cargaison explosive. Je ne cherche pas à ce que mes lecteurs se divertissent et oublient. Je cherche à ce qu’ils rient, puis qu’ils s’arrêtent de rire et se demandent : « Mais au fond, pourquoi je ris ? Et pourquoi ce rire me laisse-t-il un goût si amer dans la bouche ? ».

Je ne pourrais jamais écrire un roman de manière linéaire, du premier au dernier mot, comme on déroule un tapis. Ce serait contraire à la nature même de la pensée, de la mémoire, et de la vie elle-même. Notre existence n’est pas une ligne droite ; elle est une mosaïque. La structure fragmentaire de mes romans est donc moins un choix technique qu’un reflet honnête de notre perception du monde.

Mon processus ressemble à celui d’un peintre qui travaille sur plusieurs zones de sa toile en même temps, ou d’un musicien qui compose un thème, puis une variation, puis un contrepoint, avant de les assembler.

J’écris par vagues d’inspiration. Une scène peut s’imposer à moi avec une force et une clarté absolue. Un dialogue peut résonner dans ma tête. L’image d’un personnage dans une situation précise peut me hanter. Je saisis ces fragments au vol, je les écris tels qu’ils viennent, sans me soucier de leur place dans la chronologie. Chaque fragment est une cellule autonome, avec sa propre énergie, son propre rythme, sa propre couleur. Je les collectionne, je les accumule, comme un archéologue rassemble les tessons d’une poterie antique.

La deuxième phase est celle de l’architecte. Une fois que j’ai une masse critique de ces fragments, je les étale devant moi, métaphoriquement parlant. C’est là que commence le véritable travail de construction. Je cherche les échos, les résonances, les contrastes. Je me demande : que se passe-t-il si je place cette scène de contemplation juste après cette scène de violence ? Si je juxtapose ce souvenir d’enfance avec cette désillusion d’adulte ?

Le découpage n’est donc pas une action mécanique faite après l’écriture. L’écriture elle-même est fragmentaire, et l’assemblage est une seconde écriture. C’est dans l’agencement des fragments, dans les silences et les ruptures entre eux, que le sens final du roman émerge. Le lecteur est invité à participer à cette construction, à tisser les liens, à combler les vides. Donc, je ne découpe pas une ligne droite. Je tente de construire une constellation à partir d’étoiles nées séparément. C’est un processus plus chaotique, plus intuitif, mais je crois qu’il est le seul capable de capturer la complexité et la nature brisée de l’expérience humaine.

C’est une question douloureuse et complexe, qui touche aux nerfs les plus sensibles de l’histoire et de l’identité algériennes. Dire que le roman de langue arabe est à la marge est un constat amer, mais qui contient une grande part de vérité, même si des auteurs talentueux émergent constamment. Les raisons, selon moi, sont un enchevêtrement de facteurs historiques, politiques, sociaux et économiques.

D’abord, il y a le poids écrasant de l’histoire coloniale. La France n’a pas seulement occupé une terre ; elle a mené une politique d’acculturation profonde. Pendant 132 ans, la langue française a été la langue du pouvoir, de l’administration, de l’élite intellectuelle et de l’ascension sociale. La langue arabe, quant à elle, a été activement combattue, reléguée au statut de langue du colonisé, une langue de la sphère privée et religieuse, privée de son potentiel modernisateur. Cet héritage ne s’efface pas en quelques décennies. Il a créé une fracture linguistique et culturelle qui persiste aujourd’hui. Ensuite, il y a eu la politique d’arabisation post-indépendance. Menée de manière idéologique et souvent maladroite, elle a été perçue non pas comme une réappropriation culturelle, mais comme un outil politique. Elle a produit un arabe scolaire, souvent rigide et déconnecté de la langue vivante parlée par le peuple (la Darija). Cela a créé une situation paradoxale: une élite qui continue de penser et de créer en français, et une production en arabe qui peine parfois à trouver une langue littéraire moderne et vibrante, capable de capturer la complexité du réel algérien. Le romancier arabophone se retrouve alors pris en étau entre un arabe classique jugé artificiel et une langue parlée jugée non-littéraire.

 Le troisième facteur est celui de la visibilité et de la reconnaissance internationale. C’est un cercle vicieux. Les maisons d’édition françaises (et francophones en général) sont plus puissantes, mieux structurées, et offrent un accès direct à un marché mondial, aux traductions, aux grands prix littéraires. Un roman écrit en français a, dès sa naissance, une chance bien plus grande d’être lu, critiqué et reconnu au-delà des frontières algériennes. Cette validation par l’ancienne métropole, aussi problématique soit-elle, continue de conférer un prestige et une visibilité que le circuit du livre arabe, plus fragile et plus local, peine à offrir.

Enfin, il ne faut pas négliger la dimension sociologique. La lecture, en Algérie comme ailleurs, est souvent un marqueur social. Pour une certaine partie de la population, lire en français reste un signe de distinction, d’ouverture et de modernité. Le livre francophone bénéficie d’un réseau de distribution et de médiatisation souvent plus dynamique et mieux établi.

En somme, le romancier arabophone en Algérie est un combattant. Il se bat contre le poids de l’histoire, contre une politique linguistique ambivalente, contre l’hégémonie d’un marché du livre mondialisé et contre des préjugés sociaux tenaces. Sa position n’est pas marginale par manque de talent, mais parce qu’il évolue sur un terrain miné par des forces qui le dépassent. C’est une bataille pour la légitimité, non seulement de sa langue, mais de sa propre vision du monde.

Votre question est juste, mais pour être tout à fait honnête, l’absence de coédition en Algérie pour « Le triomphe des imbéciles » ne m’a absolument pas surpris. Ce n’est pas un incident isolé, un simple accident de parcours éditorial. C’est la suite logique et prévisible d’une situation que je vis depuis mes tout débuts sur la scène littéraire algérienne : une mise à l’écart systématique et délibérée.

La vraie question n’est peut-être pas seulement « pourquoi ce livre n’a pas été coédité ? », mais plutôt « pourquoi s’étonner que ce livre, précisément celui-là, subisse le même sort que son auteur depuis des années ? ». Pourquoi personne ne demande jamais pourquoi je ne suis invité à aucune manifestation culturelle officielle en Algérie ? Ni au Salon International du Livre d’Alger (SILA), ni aux colloques, ni aux rencontres littéraires financées par l’État. Mon nom est systématiquement biffé des listes.

Pourquoi les médias algériens, dans leur grande majorité, organisent-ils un silence si assourdissant autour de mon travail ? Quand mes romans sont publiés en France chez des éditeurs aussi prestigieux qu’Actes Sud ou Le Seuil, c’est un non-événement. Quand j’atteins les sélections finales de prix littéraires français reconnus, c’est comme si cela n’était jamais arrivé. C’est une volonté active d’ignorer, d’effacer.

Dans ce contexte, comment imaginer qu’un éditeur algérien, surtout pour un livre au titre aussi provocateur que « Le triomphe des imbéciles », prenne le risque de le coéditer ? Ce serait aller à contre-courant de la ligne non-dite mais très claire du pouvoir culturel en place. Ce serait donner une visibilité à un auteur qu’on a décidé de maintenir dans l’ombre. Un éditeur qui dépend des subventions, des facilités administratives et qui doit naviguer dans un climat de peur, ne peut tout simplement pas se le permettre. L’autocensure n’est plus un choix, c’est une condition de survie.

Donc, l’absence de coédition pour ce roman n’est pas une simple affaire commerciale. C’est un acte qui confirme mon statut d’écrivain marginalisé dans mon propre pays. C’est la preuve la plus cruelle que la satire féroce contenue dans le livre touche une corde sensible. Le système que je décris dans le roman – ce « triomphe des imbéciles » – est le même qui, dans la réalité, s’assure que la voix qui le dénonce soit étouffée. La boucle est bouclée, de la manière la plus ironique et la plus amère qui soit.

La traduction n’est pas une simple opération technique, c’est une véritable renaissance pour le texte, et pour l’auteur qui l’accompagne. L’expérience de la traduction a enrichi mon écriture de plusieurs manières, parfois paradoxales.

D’une part, la traduction est l’épreuve de vérité ultime pour un texte. Quand vous écrivez dans votre langue maternelle, l’arabe pour moi, vous êtes dans un confort total. Vous êtes maître des nuances, des allusions culturelles, du rythme de la phrase. La traduction fait voler en éclats ce confort. Le traducteur, qui est votre premier lecteur véritablement étranger, devient votre miroir le plus impitoyable. Chaque question qu’il pose (« Que voulez-vous dire exactement par cette expression ? », « Cette métaphore fonctionne-t-elle en français ? ») vous oblige à retourner à l’essence même de votre pensée. Vous êtes forcé de clarifier, de solidifier, de justifier vos choix. Cela m’a appris à écrire avec plus de rigueur, à traquer les facilités et les ambiguïtés involontaires dans mon propre texte original.

D’autre part,  la traduction est une leçon d’humilité. Vous réalisez que votre langue, que vous pensiez si riche et si précise, a ses propres limites. Vous découvrez qu’un mot qui vous semblait parfait en arabe n’a pas d’équivalent direct, qu’une structure de phrase qui vous paraissait élégante devient lourde et maladroite dans une autre langue. Cette confrontation vous fait prendre conscience que votre vision du monde est façonnée, et donc limitée, par votre langue. Cela vous pousse à penser au-delà des mots, à chercher l’idée ou l’émotion pure qui se cache derrière, celle qui peut survivre au voyage d’une langue à l’autre.

Enfin, et c’est peut-être le plus enrichissant, voir son texte renaître en français m’a permis de le redécouvrir comme un lecteur étranger. C’est une expérience presque schizophrénique. Soudain, les mots ne sont plus les miens, mais l’histoire l’est toujours. Je peux prendre de la distance et voir la structure de mon roman, ses forces et ses faiblesses, avec une clarté nouvelle. Parfois, une traduction réussie peut même révéler des beautés ou des significations que je n’avais pas consciemment placées dans le texte original, mais qui étaient là, en potentiel.

En somme, la traduction m’a appris à ne pas être seulement un écrivain arabe, mais un écrivain tout court. Elle m’a forcé à chercher l’universel dans le particulier, à construire des ponts là où je ne voyais que mon propre rivage. Elle a rendu mon écriture plus consciente, plus exigeante, et paradoxalement, plus libre, car je sais maintenant que pour qu’une histoire voyage, elle doit être assez forte pour abandonner la peau de sa langue natale et en revêtir une nouvelle sans perdre son âme.

Passer du genre romanesque au genre journalistique n’est pas pour moi un grand écart, mais plutôt un changement de focale. Le sujet observé reste le même : la comédie humaine, les absurdités politiques, les fractures de la société. Seul l’outil et l’angle d’attaque changent.

Le roman est une plongée en apnée. C’est un engagement total, un marathon qui se court sur des années. Il me permet d’explorer les zones d’ombre, l’ambiguïté des âmes, les motivations secrètes des personnages. Dans le roman, le temps est élastique. Je peux disséquer une seconde sur dix pages ou traverser dix ans en une seule phrase. Le roman est le lieu de la complexité, du doute, de la nuance. C’est un travail en profondeur, une exploration des « pourquoi ».

La chronique journalistique, elle, est un sprint. C’est une réaction à chaud, un coup de poing direct en réponse à l’actualité immédiate. Elle exige la clarté, la concision, l’efficacité. On ne peut pas se permettre les détours et les ambiguïtés du roman. Le but est de capturer un événement, une idée ou une injustice, et de la présenter au lecteur avec une opinion claire et argumentée. La chronique est le lieu de l’urgence, de la prise de position. C’est un travail sur le « quoi » et le « maintenant ».

Alors, comment s’opère le passage ? Je dirais que les deux genres se nourrissent mutuellement. Mes romans sont imprégnés de la réalité sociale et politique que j’observe au quotidien pour mes articles. Les personnages de mes romans pourraient être les protagonistes anonymes des faits divers que je commente. Le roman donne de la chair et une profondeur psychologique aux squelettes des événements que la chronique expose.

Inversement, l’écriture journalistique m’impose une discipline salutaire. Elle m’entraîne à aller droit au but, à formuler une pensée de manière percutante, à me méfier du jargon et de l’abstraction. C’est un excellent antidote contre la complaisance stylistique dans laquelle un romancier peut parfois se perdre.

Le passage de l’un à l’autre est donc une question de contrainte et de libération. Quand j’écris une chronique, je suis contraint par les faits, par l’actualité, par un nombre de mots limité. C’est un exercice de précision chirurgicale. Quand je retourne au roman, je me sens libéré de ces contraintes. Je peux à nouveau déployer mes ailes, explorer les méandres de l’imagination, laisser mes personnages respirer et dériver.

En fin de compte, que ce soit dans un roman ou une chronique, je reste le même observateur. Dans la chronique, je pointe mon doigt vers une absurdité précise et je la nomme. Dans le roman, je construis un monde entier pour que le lecteur puisse ressentir cette même absurdité de l’intérieur, dans sa propre peau. L’un est un constat, l’autre est une expérience.

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Propos recueillis par TAWFIQ BELFADEL

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